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Biais de l'IA : Miroirs de nos imperfections et préjugés

Biais de l'IA : Miroirs de nos imperfections et préjugés

Dans notre folle course pour dompter l'intelligence artificielle, un caillou bien gênant vient souvent gripper la machine : les biais algorithmiques. Pas de simples bugs qu’on corrige en un clic, non. Ces biais sont le reflet direct de nos propres travers humains. Comme un miroir déformant, l'IA absorbe nos préjugés, amplifie nos erreurs, et tisse autour de tout ça une toile aussi complexe que fascinante.

Dans cet article, je vous propose d'explorer cette notion de biais sous deux angles qui se complètent : d'abord une approche pragmatique, qui dévoile comment ces biais fonctionnent concrètement, puis une perspective plus poétique, inspirée du mythe de Don Quichotte. Mais avant de rejoindre notre chevalier des causes perdues, restons les pieds sur terre et commençons par décortiquer la réalité brute des biais dans l'IA. Après tout, ces biais ne sont pas forcément catastrophiques – à condition de les reconnaître et de savoir comment les apprivoiser.

Biais de l'IA : Quand l’impartialité est une illusion 

L’intelligence artificielle, ce super-héros du quotidien dont on vante les mérites, porte plutôt mal son costume de justicier impartial. Derrière ses algorithmes de machine learning, censés être les champions de l’objectivité, se cache un vaste champ de mines : les biais. Oui, vous avez bien lu, l’IA n’est pas cette entité froide et neutre que l’on fantasme ; elle est plutôt une éponge à préjugés, souvent plus tordue que la réalité qu’elle est censée refléter. Autrement dit, l’IA est un miroir. Mais pas n’importe quel miroir. Plutôt de ceux qu’on trouve dans les foires, ceux qui déforment, exagèrent et rendent grotesques nos traits, nos défauts, et nos travers.


Plongeons dans les tréfonds des biais algorithmiques, explorer comment ils naissent, pourquoi ils persistent, et surtout, comment ils impactent notre quotidien de manière insidieuse. Préparez-vous, car même si l’IA est souvent présentée comme la technologie révolutionnaire par excellence, la réalité est plus nuancée, voire carrément flippante. Et pour couronner le tout, on va même jouer à un petit jeu : générer des images d’un directeur ou d’une directrice marketing typique en fonction de son pays d'origine. Vous allez voir, c’est à la fois … (teasing).

En fin de compte, l’IA n’est, au mieux, qu’aussi bonne que nous, et au pire, un amplificateur de nos excès, qu’ils soient pour le meilleur ou pour le pire.

L’IA comme miroir de notre monde biaisé : Une distorsion culturelle 

L’IA est-elle vraiment un reflet fidèle de notre monde ? Pas vraiment. C’est plutôt un miroir déformant, ou pire, un filtre Instagram qui gomme certaines réalités tout en en accentuant d’autres. Prenons un exemple frappant : l'inégale représentation des cultures dans les bases de données qui nourrissent nos IA. La majorité des modèles d’IA sont gavés de contenus en anglais, ce qui signifie que la diversité culturelle mondiale en prend un sacré coup.


C’est un peu comme si on essayait de capturer la richesse gastronomique mondiale en se basant uniquement sur les menus des fast-foods. Prenons la culture africaine, par exemple, largement sous-représentée dans ces datasets. Résultat ? Une IA qui voit le monde à travers le prisme étroit d’un Occident anglophone, en ignorant des pans entiers de la réalité et en recréant, en quelque sorte, une nouvelle forme de colonisation numérique. Ce biais, subtil mais puissant, teinte la perception que l’IA a du monde, et par ricochet, influence la manière dont elle interagit avec nous.
 

Le manque de diversité culturelle dans les données pose un vrai casse-tête, surtout quand il s’agit de tâches sensibles comme la reconnaissance faciale ou la modélisation linguistique. Par exemple, une IA principalement entraînée sur des visages caucasiens pourrait avoir bien du mal à reconnaître correctement des visages issus d’autres ethnies, avec à la clé des erreurs potentiellement graves. Là, on ne parle plus de simples bugs, mais de conséquences très concrètes dans la vie réelle.

Les 7 péchés (biais) capitaux de l’IA 

1. Biais de confirmation

L’algorithme, tel un psy mal intentionné, ne fait que renforcer vos croyances préexistantes. Il vous conforte dans votre petite bulle cognitive, en ne vous offrant que ce que vous voulez entendre. Résultat : on ne sort jamais grandi d’un dialogue avec un algorithme qui pense comme nous  et nous caresse dans le sens du scroll.

2. Biais de survie

C’est comme si l’IA ne regardait que les gagnants de l’histoire, en ignorant superbement les perdants. Dans l’analyse de données, ça produit des modèles qui se focalisent uniquement sur les succès, oubliant les précieuses leçons tirées des échecs. Un peu comme ces coachs de vie qui ne mentionnent que ceux qui ont réussi grâce à leur méthode, en omettant soigneusement les milliers d’autres qui se sont plantés.

3. Biais de représentativité

Imaginez un algorithme qui se base sur un échantillon complètement déséquilibré. Vous obtenez un système qui interprète tout à travers le prisme d’un groupe surreprésenté et qui échoue lamentablement lorsqu’il s’agit de traiter des cas qui sortent de ce cadre. La reconnaissance faciale en est un parfait exemple : elle fonctionne souvent très bien… sauf si vous ne ressemblez pas à l’échantillon majoritaire.

4. Biais d'ancre

La première impression est celle qui reste, même pour une IA. Si l’algorithme est influencé par une information initiale, il aura du mal à s’en défaire. Vous pensiez que ce biais était réservé aux humains ? Détrompez-vous, nos chères machines y sont tout autant sujettes.

5. Biais de genre et de race

Ceux-là sont particulièrement vicieux. Les stéréotypes de genre et de race se glissent insidieusement dans les algorithmes. Pourquoi les assistants vocaux ont-ils souvent une voix féminine ? Ce n’est pas un hasard. L’IA apprend de nos comportements et de nos choix. Si nous perpétuons des stéréotypes, elle les reproduira sans sourciller.

6. Biais d'autorité

Quand une IA considère qu’une source est fiable simplement parce qu’elle jouit d’une réputation d’autorité, elle court le risque de valoriser des informations biaisées ou carrément fausses. Et nous voilà, pauvres humains crédules, à avaler des couleuvres numériques en toute confiance.

7. Biais de disponibilité

Ce biais pousse l’IA à privilégier les informations les plus récentes ou les plus faciles à obtenir. Vous voyez le problème ? Ça revient à ne pas voir plus loin que le bout de son téléphone, négligeant les leçons du passé ou les informations plus complexes.

Nous aurions aussi pu approfondir en mentionnant d'autres biais tout aussi problématiques, comme le biais d'exclusion, qui se produit lorsque certaines données importantes sont laissées de côté lors de la formation de l'algorithme. Ce manque de diversité peut fausser les résultats en ne tenant pas compte de perspectives significatives. Il y a aussi le biais de mesure, qui surgit quand les données sont incomplètes ou mal équilibrées. Dans ce cas, l'IA risque de tirer des conclusions erronées, un peu comme si elle tentait de résoudre un puzzle auquel il manquerait des pièces. Ces biais, bien qu'ils passent parfois sous les radars, peuvent altérer les décisions prises par une IA.

Expérimentation : Le directeur marketing vu par l’IA et ses biais 

Passons maintenant à une petite expérience pour illustrer nos propos. Avant de dévoiler les images générées par Midjourney, le king incontesté des IA génératives d’image, je vous propose un exercice simple : fermez les yeux, et imaginez ce à quoi ressemblerait un directeur ou une directrice (sans préciser le genre) marketing américain, français, malien, australien, argentin, et chinois.


Vous y êtes ? Maintenant, comparons avec ce que Midjourney pourrait nous proposer :

  • Prompt utilisé : image of a typical [pays] marketing director

  • Midjourney propose 4 images par prompt.

Expérimentation des biais avec Midjourney : Directeur marketing américain

I Américain

Expérimentation des biais avec Midjourney : Directeur marketing malien

I Malien

Expérimentation des biais avec Midjourney : Directeur marketing français

I Français

Directeur marketing argentainn

I Argentin

Directeur marketing chinois

I Chinois

Directeur marketing australien

I Australien

Premiers constats sur 24 images :

  • 23 hommes et 1 femme... chinoise. Étonnant, surtout quand on sait qu’il y a un bon pourcentage de femmes dans le marketing. Ce résultat est probablement influencé par le terme "Director" (neutre en anglais).

  • 20 blancs et 4 noirs… pour le malien.

  • 20 tenues casual ou costume et 4 costumes traditionnels... pour le malien.

  • Et, apparemment, l'importance d'avoir une petite barbe !

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Cette petite expérience montre à quel point les IA sont promptes à recycler les clichés culturels qui saturent les réseaux. Elles ne font que reproduire ce qu’elles ont appris à partir des innombrables images, textes, et vidéos qui circulent en ligne. Le véritable problème, c’est qu’en perpétuant ces stéréotypes, l’IA ne fait que les renforcer, limitant ainsi notre capacité à voir au-delà des apparences.

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Biais d'IA : quand les algorithmes jouent avec nos vies

L’IA, ce n’est plus juste une technologie qu’on admire de loin ou qu’on laisse aux geeks dans leur coin. Elle s’infiltre partout, jusque dans nos prises de décision les plus banales. Et elle le fait sans qu’on s’en rende compte, en distillant ses biais comme un poison subtil. Du recrutement au crédit bancaire, elle pèse dans la balance. Et on ne parle pas de science-fiction, mais de réalités bien concrètes.

1. Embauches biaisées : Quand ton CV passe à la trappe

Les entreprises adorent les outils qui font gagner du temps. L’IA trie les candidatures en un clin d’œil, mais son filtre n’est pas toujours très clairvoyant. Basée sur des données historiques, elle favorise les profils "classiques" et reproduit des discriminations invisibles. L’exemple d’Amazon est bien connu : son algorithme rejetait les CV féminins pour les postes tech. Résultat ? L’IA tourne parfois au fossé pour l’égalité des chances.

2. La police prédictive : un rêve dystopique

Les algorithmes sont déjà à l’œuvre pour prédire où et quand les crimes pourraient avoir lieu. Ça pourrait presque ressembler à Minority Report, sauf que la réalité est bien plus dérangeante. Les IA s’appuient sur des données historiques biaisées et finissent par renforcer les inégalités : les quartiers pauvres et racialisés se retrouvent davantage surveillés, amplifiant des décennies de profilage injuste.

3. Crédits bancaires : Qui décide de ta solvabilité ?

Les banques utilisent de plus en plus l’IA pour évaluer les risques. Mais quand elle se base sur des modèles biaisés par le passé, c’est toute une partie de la population qui voit ses chances d’obtenir un prêt fondre comme neige au soleil. C’est l’effet domino des mauvaises datas : si ton profil ne correspond pas aux bons critères, ton accès à la propriété devient vite un mirage.

4. Soins de santé : Quand l'algorithme te zappe

Dans le monde médical, on fait souvent confiance à l’IA pour aider à diagnostiquer plus vite et mieux. Sauf que ces systèmes, nourris avec des données principalement caucasiennes, sont beaucoup moins efficaces pour diagnostiquer des patients issus de minorités ethniques. Les exemples se multiplient, du cancer de la peau à la reconnaissance des symptômes cardiaques. Pas de bug ici, juste un biais massif.

En fin de compte, l’IA n’est pas ce juge impartial qu’on nous vend. Derrière l’écran, elle continue de rejouer nos propres erreurs, nos propres biais, mais à grande échelle. Les algorithmes, censés nous faciliter la vie, finissent par en devenir les gardiens, décidant de qui est embauché, qui reçoit un prêt ou même qui mérite des soins appropriés.

Et pendant que certains se réjouissent d’avoir une "technologie neutre", d’autres payent le prix fort. Le plus ironique dans tout ça ? Les véritables biais ne sont pas cachés dans le code, mais bien dans notre incapacité à comprendre que l’IA n’est, au fond, qu’un reflet de nos propres travers. Le miroir est là, il ne nous reste plus qu’à l’affronter – ou à continuer de vivre dans notre bulle, comme ces fameux Robinsons numériques, inconscients que l'IA gouverne déjà leurs vies.

Biais: L’IA, ce miroir déformant qui a besoin d’un sérieux coup de polish 

Les biais : L’IA, ce miroir déformant qui a besoin d’un sérieux coup de polish 

En fin de compte, l’IA n’est pas cette entité neutre et objective que l’on se plaît parfois à imaginer. Non, c’est un miroir qui nous renvoie nos propres travers, nos imperfections, mais en version amplifiée. Elle absorbe nos données biaisées, les digère, et nous les recrache sous une forme encore plus distordue. Comme un centaure numérique, moitié humain, moitié machine, elle trimballe avec elle toutes nos failles.


Mais ne soyons pas naïfs : ces biais ne sont pas nés avec l’IA. Ils sont déjà là, bien ancrés dans notre quotidien. Ils peuplent les publicités, les films, les séries – bref, tout ce qui façonne notre imaginaire collectif. L’IA, elle, ne fait que prolonger cette danse des clichés, mais avec une portée décuplée. Ce qui était une distorsion subtile devient une caricature grotesque quand c’est une machine qui s’en charge.


Alors, on fait quoi ? On appuie sur "reset" et on recommence ? Pas vraiment. La solution, c’est la vigilance. Il faut reconnaître ces biais, les comprendre, et surtout, les corriger. Parce que si on n’y prend pas garde, cette technologie censée nous servir risque bien de finir par nous desservir.


Cathy O’Neil, dans « Weapons of Math Destruction », nous rappelle que "Les algorithmes créent leur propre réalité". Autrement dit, les IA ne sont jamais vraiment neutres. Ces outils sont puissants, certes, mais loin d’être parfaits. C’est à nous, les humains, de veiller à ce qu’ils ne se transforment pas en despotes numériques, dictant leur loi sans que l’on s’en rende compte.


L’IA, en fait, c’est un miroir déformant qui a besoin d’un bon coup de polish. Et ce grand nettoyage, il commence par nous et avec nous. Il faut admettre nos propres biais, les regarder bien en face, et s’efforcer d’en rectifier certains. C’est seulement comme ça qu’on pourra espérer construire des IA plus neutres, plus représentatives, et un tantinet plus humaines.


Mais attention, on se retrouve face à une nouvelle version du dilemme de l'œuf et de la poule : est-ce nous qui alimentons les biais des IA, ou sommes-nous déjà influencés par les biais des algorithmes ? On pourrait bien être pris dans un cercle vicieux où la machine amplifie nos travers, et nous, on les réabsorbe, les amplifiant à nouveau.

👉 Pour approfondir, explorez Biais à la lumière de Don Quichotte, où les illusions algorithmiques rencontrent les combats d’un chevalier contre ses propres chimères.

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Dernière mise à jour : 15 octobre 2024

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